LA RESTAURATION

Le chantier de restauration

Le marché de la restauration a été confié à la société ARKÉ. La Conservation Régionale des Monuments Historiques a demandé à ce que ce chantier commence par une phase documentaire dont l’importance est en rapport avec la qualité de l’œuvre et le grand nombre d’interventions dont elle a fait l’objet depuis le XIXe siècle.
En effet, après le rattachement d’Avignon et du Comtat Venaissin à la France en 1791 et la nationalisation des biens du clergé, le Palais des Papes est devenu une caserne et une prison durant tout le XIXe siècle. Cette affectation a fait subir de graves dégâts aux peintures dont la restauration a commencé par la chapelle Saint-Martial dès 1906.

A compter du début du XXeme siècle, la chapelle Saint-Martial a fait l’objet de plusieurs interventions de restauration. Si ces restaurations ont arrêté le processus de détérioration (notamment  le risque de chute de l’enduit peint à plusieurs endroits et le risque de perte de la couche picturale à l’état pulvérulent), les produits utilisés ont cependant amorcé de nouveaux processus de dégradation et ont assombri, en vieillissant, l’éclat des peintures.

Les interventions anciennes
Après une intervention de consolidation avec des injections à base de mortier de silicate de potasse effectué par J-L.Yperman dans les années 1906-07, M. Nicaud entreprend de nouveaux travaux de restauration en 1960.
Comme pour Yperman, le nettoyage consiste ici essentiellement en un lavage à l’eau après époussetage. Il s’agissait surtout de consolider les enduits détachés ou boursouflés (ph.1) ainsi que la couche picturale à l’état pulvérulent. Toutes les interventions effectuées par Nicaud utilisent l’acétate de polyvinyle, produit nouveau en restauration à cette époque et qui couvre toute la surface des fresques. (ph.2)

 
Ph.1 Ph.2  

En 1970, Nicaud est chargé de retravailler à la chapelle afin de permettre une campagne photographique complète. Il commence par brosser les parties salpêtrées et en fixe la peinture avant de revenir sur son travail de maquillage (ph.7).




Ph.7
En 1978, R. Baudouin est chargé de faire une révision de la chapelle et  lui aussi consolide les enduits mais en utilisant, cette fois, le caséate de chaux. Il entame en même temps une campagne d’essais de dégagement en partie basse (ph.8). Puis il est chargé, en 1991, d’une étude.
Ph.8
En 1997, I. Dangas est chargée d’une étude préalable à la restauration des fresques, durant laquelle sont effectués de nombreux prélèvements pour les analyses chimiques des pigments et liants ainsi  que de l’imagerie scientifique (thermographie, réflectographie infra-rouge, fluorescence ultra-violette et infra-rouge).
Une zone de la paroi occidentale est nettoyée qui démontre le bénéfice potentiel pour l’œuvre (ph.9). 
Ph.9















L’intervention actuelle par ARKÉ
Les études antérieures permettent d’entreprendre cette nouvelle restauration en disposant d’une meilleure connaissance scientifique et technique des fresques.

Ph.10 ©ARKE
La première phase du travail a consisté à élaborer une documentation graphique très détaillée, portant sur chacune des quatre parois et la totalité des voûtes et concernant la technique originale d'exécution, l’état de conservation de l’œuvre, l’enregistrement des interventions précédentes et des interventions actuelles. La documentation complète sera composée d’environ 200 planches. (ph.10 & 10bis)

L’assistance d’un laboratoire d'analyse scientifique permet de répondre aux problèmes divers (climat, matériaux constitutifs de l’œuvre, etc. ), au fur et à mesure qu’ils se posent et de d’élaborer en conséquence une méthodologie d'intervention.
L’intervention sur les décors peints de la chapelle Saint-Martial est menée selon  une approche prudente.

Ph.10bis ©ARKE
Le travail a commencé par une opération longue et fondamentale de re-adhésion de la couche picturale et des enduits. La seconde étape, très délicate, est l’allègement, visant à amincir couche par couche les strates qui assombrissent et déséquilibrent les rapports chromatiques originaux.

Ph.11 ©ARKE 
Les premiers résultats obtenus sont très encourageants. (ph.11). Ils ont permis de vérifier que l’on pouvait rendre cohésion et solidité à ces peintures murales tandis que le nettoyage et l’allègement ont montré que l’on peut retrouver une meilleure lisibilité de ces fresques dans leur ensemble comme dans les détails. La qualité du dessin, la vigueur des couleurs ainsi que la subtilité des jeux d’ombres et de lumières réapparaissent sous l’effet de cette restauration, dont chaque étape décisive est validée par un comité scientifique.

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Le consorzio ARKÉ
Le Consorzio ARKÉ est une société installée à Rome, créée en 1985 et dirigée par Manuela Micangeli et Ambra Tomeucci.
Tous les restaurateurs de ce consorzio sont des restaurateurs diplômés de l’Istituto Superiore per la Conservazione ed il Restauro de Rome (spécialité peinture).
Son activité porte tant sur la restauration d’édifices que sur celle de peintures murales, de peintures sur panneaux de bois et toiles, de sculptures et objets archéologiques.
Dans le domaine de la peinture murale médiévale, ARKÉ a déjà restauré des œuvres italiennes très importantes :
  • certaines fresques de la chapelle des Scrovegni réalisées par Giotto à Padoue (XIVe siècle),
  • les fresques de l’entrée de la Libreria Piccolomini de la cathédrale réalisées par Pinturicchio à Sienne (XVe siècle),
  • les fresques de la fameuse Chambre des époux réalisées par Mantegna au château de San Giorgio de Mantoue (XVe siècle).
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